Sortie dans les Vosges mai 2008

Section de discussion et d'évocation des reportages photos concernant les différentes espèces dans leur milieu naturel.
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Philippe Wegnez
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Enregistré le : jeu. 15 mai 2008 21:12

Sortie dans les Vosges mai 2008

Message par Philippe Wegnez »

Salut à tous,

Voici le petit (long!) compte rendu de mon dernier séjour dans les Vosges. Ce récit est également sur le forum de WalBru (inventaire fourmis en Wallonie)
Bonne lecture et content de vous revoir tous en ligne.
A+
Phil

Balade dans les Vosges.

Enfin le grand moment. Il est 5h00 quand le réveil sonne ce samedi 17 mai. Le temps de tout embarquer dans la camionnette et de prendre la route vers Vecoux. Comme l’année passée, il pleut en Belgique lorsque je démarre.
Sur l’autoroute du « soleil », il tombe des cordes. Sur le territoire belge, dans la province du Luxembourg, les pompiers, les gendarmes et une dépanneuse découpent et embarquent ce qui reste d’un camion qui s’est enroulé autour d’un poteau de la berne centrale. La cabine complètement broyée et brûlée n’a certainement pas permis au chauffeur de s’en sortir vivant. Jenifer avec son « Y a comme un Hic » passe en boucle sur une bonne partie de la route. Premier arrêt vers 8h00, sur un parking en France. Se dégourdir les jambes, déjeuner et téléphoner à la petite famille pour donner des nouvelles. J’en profite aussi pour récolter quelques fourmis. Je reprends la route, après une demi-heure, et j’arrive à Vecoux vers 9h45. Un petit bonjour aux personnes qui m’accueillent en chambre d’hôte et hop départ pour la balade.
Le temps est maussade et il fait froid. Je refais la même balade que l’année dernière, à mon arrivée, mais aucune fourmi ne pointe le bout de ses antennes. Je fouille sous la mousse, retourne les pierres où il n’y a que quelques Myrmica ruginodis. Arrivé au niveau du col de Xiard, une trombe d’eau s’abat sur moi. Malgré ma cape imperméable, je suis obligé de me réfugier sous un arbre. Coincé pour être coincé autant manger mes sandwichs, il est quand même 12h30. Après 1 heure de déluge enfin une accalmie. Je reprends ma route en direction de la tourbière de La Charme. J’avais trouvé des Temnothorax clypeatus la dernière fois et n’ayant plus d’exemplaires, pour moi, j’espérais en retrouver. Sur le chemin, plus la moindre trace des Camponotus herculeanus, le mauvais temps, certainement. Arrivé sur la tourbière, je constate qu’il n’y a presque pas d’activité, au niveau des fourmis. Je trouve quelques gynes de Myrmica en vadrouille mais aussi, en fouillant un peu plus, des Tetramorium, des Leptothorax « muscorum », des Myrmica schencki, et 2 Formica pratensis. Aucune trace de Temnothorax clypeatus. Les averses m’obligent à me réfugier une nouvelle fois. Après ½ h d’attente, je décide que la journée est bonne comme ça. Il est 18h40 lorsque j’arrive chez Madame et Monsieur Dupré. Une bonne douche et un bon souper plus tard, j’étudie la carte de la région pour planifier ma journée du lendemain. 22h00, les paupières fermées, je m’endors en voyant des fourmis courir sur le sol.

Dimanche 18 mai 8h00, déjeuner.
Vers 8h45, je récupère mes chaussures qui sont pratiquement sèches ainsi que ma cape et je me mets en route pour la Piquante Pierre (région de Planois). Après une trentaine de minutes de route, j’arrive sur le parking du lieu de balade (Col de Menufasse, Alt. 966m). Le ciel est couvert, le vent est froid et je n’ai toujours que mon short, un sweet et ma cape imperméable pour seule protection. J’emprunte le chemin devant moi et me dirige vers un petit massif de blocs situé au milieu d’une prairie. Je récolte au passage quelques Myrmica, Formica « lemani » et Formica sanguinea. Pas la moindre trace de dômes de Formica et une activité très réduite au niveau des fourmis. Je trouve, sur les blocs, énormément de nids de Tetramorium et quelques nids de Leptothorax « muscorum ». Tiens, la pluie refait son apparition ! Ca faisait longtemps !! Vers 12h30, je retourne à la camionnette pour récupérer ma baguette et mon fromage afin de dîner. 13h30, je repars et prends le chemin vers « Les Roches St Jacques » (Alt.1028m). Toujours rien de bien intéressant ; M.schencki, F.sanguinea. J’emprunte un petit chemin qui ressemble plus à un coupe feu, mes godasses sont trempées par l’herbe haute. Ca y est, je suis dans un nuage, au sens propre. Je poursuis ma route et m’arrête devant un énième souche dans laquelle je frappe pour une énième fois (pour chercher les éventuelles Lasius « jaunes » qui pourraient s’y trouver). Boum ! Rien, jusqu’au moment où il me semble avoir vu tomber une « grosse » fourmi. Il m’a semblé reconnaître C.herculeanus. Je gratte les débris et effectivement il s’agit bien de cette espèce. Une deuxième, puis une troisième ouvrière tombent de la souche. Je prends juste les deux premières et je repars. Pfft, pas très loin car je dois à nouveau m’abriter de la pluie. Je trouve des Formica « rousses » dans une souche où je suis abrité mais il n’y a aucun nid à proximité. Bizarre. Je regarderai au bino. Je redémarre et me dirige vers la Piquante Pierre (Alt.1008m) où une stèle dédiée aux soldats et civils, abattus lors de la seconde guerre mondiale, est dressée. Je déambule dans le coin mais le temps est vraiment mauvais. Je décide de faire de la prospection des lieux en guise de repérage pour le mois d’août. Je repars vers la camionnette pour prendre un chemin de l’autre côté du col. Cette balade m’amène vers la tourbière de Jemradfaing (Alt.1023m). Superbe endroit où je découvre des dômes de Formica (peut-être F.lugubris, à cette altitude). Un des dômes est situé sur la tourbière elle-même. Comme il n’est pas loin de la lisière forestière je vais prélever quelques fourmis dessus. J’avance maintenant d’un bon pas car l’heure passe et le souper est à 19h. J’arrive en vue du col de Menufasse où ma camionnette m’attend. Je fais un arrêt rapide dans une prairie où j’ai repéré d’autres dômes (Alt.1005m) afin d’y prélever quelques fourmis. Je regagne la camionnette presque au pas de course car il est 18h00 et j’ai encore de la route à faire avant d’être à Vecoux. Il est 18h50 lorsque j’arrive chez les Dupré. Je bourre mes chaussures de gazettes et prends une bonne douche. Le même rituel que l’autre soir. 22h dodo.

Lundi 19 mai 8h00, déjeuner.
Bon, c’est ma dernière journée sur le terrain. Après avoir longtemps hésité, je prends la route de Ventron. Le grand Ventron est situé à une Altitude de 1204m. La météo a annoncé un temps nuageux avec des éclaircies. Après 45 minutes de trajet, j’arrive à l’auberge du Grand Ventron. Enfer et damnation, j’ai oublié ma cape dans le garage des Dupré. Toute la montagne est dans les nuages et il fait un froid de canard. Tant pis, je prends un chemin dans les bois et je me dirige vers la crête.
Rien de rien sous les pierres, le sol ni sous la mousse. Sur la crête le vent souffle, la pluie tombe et je caille. Sous des pierres qui ont été utilisées pour contenir un feu, je trouve des Formica « picea ou lemani ». Je me dirige vers le sommet de la crête mais je dois à plusieurs reprises m’abriter sous les arbres car il pleut de plus en plus. Le sommet, enfin ! Une table d’orientation est présente mais tout à fait inutile pour le moment car on n’y voit pas à 10m. Après de longues hésitations je décide de redescendre dans la vallée car il n’y a rien de bon à faire, ici, dans des conditions pareilles. Je profite d’un petit étang pour dîner calmement et décider du restant de la journée, il est 13h00. Vu le temps qu’il me reste, je pars vers la tourbière de la Charme. Je voudrais vraiment essayer de retrouver T.clypeatus et F.truncorum. Il est 14h30 lorsque je commence à monter vers le col de Xiard et 15h15 lorsque j’arrive à la tourbière. Après une heure de fouille et de recherche, une évidence s’impose : je ne trouverai pas ce que je suis venu chercher. C’est donc dépité et déçu que je décide de redescendre, sous la pluie, à la camionnette.
Arrivé sur le chemin, à 20m de mon véhicule, j’aperçois quelques fourmis déambulant le long du talus. Pas de chance, un chien s’amène vers moi, en aboyant, et je suis obligé de prendre de la hauteur (sur une barrière) en attendant que son maître le récupère. Après avoir enfermé son chien chez lui, l’autochtone revient vers moi pour voir ce que je fais. Je lui explique que je fais des inventaires fourmis et que … mince qu’est ce que c’est que ça ???? Un immense rapace foncé se dirige vers moi. Il est harcelé par une corneille qui parait vraiment petite, sur le coup. Je me dirige, au pas de course, vers la prairie où le rapace semble tournoyer. Premier virage d’évitement. Si j’ai bien vu, il a la queue en forme de losange. Les noms défilent dans ma tête et je ne vois qu’un rapace avec une queue en losange, c’est le gypaète barbu !! Incroyable voir impossible qu’il s’agisse de cette espèce, ici dans les Vosges. Mais déjà le rapace fonce dans ma direction, il passe à 10m au-dessus de ma tête et je vois très distinctement les vibrisses (moustaches) qui dépassent de chaque côté de son bec. C’est bien un gypaète barbu. Il s’agit d’un immature, voilà pour la couleur foncée du plumage. L’habitant, près de moi, n’en revient pas de la taille de ce géant. Je n’ai jamais rien vu de pareil, me dit-il. Mais voilà que l’oiseau fait demi tour. Je dis vite à mon compagnon du moment ce qu’il doit regarder quand le gypaète va passer. Je veux être sûr de ce que j’ai vu. Un deuxième passage, toujours à 10m de notre tête, me conforte dans ma détermination. C’est bel et bien un gypaète barbu. L’oiseau fini par s’éloigner avec la corneille toujours à ses basques. Incroyable !! Cette foutue journée est effacée d’un seul coup par cette superbe observation de quelques minutes d’un oiseau dont l’envergure est de 2,5 à 2,9m. L’homme me dit merci et rentre vite chez lui pour noter le nom de cet oiseau dont il n’a jamais entendu parler afin de regarder dans un dictionnaire ou autre livre et ainsi en apprendre plus sur ce rapace qu’il ne verra peut-être jamais plus de sa vie. Moi non plus, d’ailleurs.
Il est 18h45 lorsque je rentre chez les Dupré. Après la bonne douche, je leur fais part de mon observation et monsieur Dupré contacte une journaliste afin de lui relater cette « découverte ». Après le souper, je prépare mes bagages et je m’endors vers 22h en ayant encore à l’esprit les images de ce magnifique oiseau passant juste au-dessus de moi.

Mardi 20 mai 8h00, dernier déjeuner.
Les bagages sont chargés et je décide de reprendre la route directement. Le temps est à peine meilleur et j’ai assez donné sous la pluie. De plus, je dois rencontrer un myrmécologue da la région de Ludres. Il est 10h40 lorsque j’arrive chez Monsieur Plateaux. Je découvre ses collections de fourmis. Il a toutes les Temnothorax, ça fait rêver. Il m’a préparé une liste d’endroits et les noms des Temnothorax à chercher et à trouver lors de mes vacances dans le Vaucluse. Il me donne également l’adresse d’un myrmécologue en Alsace qui s’occupe de prélèvements dans la région du bas et du haut Rhin. Enfin, il me remet un article qu’il a écrit, dans les années 1970, sur des cestodes parasitant des fourmis. Il me propose aussi de faire une note avec lui sur les fourmis des Vosges car il y a eu très peu de prospections dans cette région et il y a certainement de espèces qui ne demandent qu’à être découvertes. Plein de projets et de renseignements plus tard, je reprends la route vers 12h. Le déjeuner ayant été copieux, je me passerai bien de manger ainsi je serai plus vite rentré chez moi.
15h15, juste à l’heure pour récupérer mes enfants à l’école et leur faire la surprise.

Epilogue.
Quatre jours où je me suis demandé plus d’une fois ce que je foutais là.
Il n’y a rien d’agréable à s’acharner à chercher des fourmis sous la pluie avec des godasses qui se transforment en piscine, mais quand on fait 400km pour les fourmis, il est difficile de repartir comme ça.
Maintenant, il me reste toutes mes déterminations à effectuer en espérant avoir quelques surprises. Malgré tout, le déplacement en valait la peine car j’ai fait deux belles rencontres, d’une part le gypaète barbu et de d’autre part, dans mon domaine de prédilection, Monsieur Plateaux.
Lors des contacts par mail avec la journaliste qui va relater mon observation du gypaète barbu, j’ai pu faire passer aussi les renseignements sur les inventaires fourmis à savoir Antarea, Antbase.fr et bien sûr WalBru. Je demanderai une copie de l’article afin que les trois sites puissent tous avoir un exemplaire à mettre en ligne.
J’espère que vous aurez tous apprécié la balade, surtout que vous n’avez ni été mouillé, ni eu froid pendant toute l’histoire.
A+
Phil
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Jean-Luc Marrou
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Re: Sortie dans les Vosges mai 2008

Message par Jean-Luc Marrou »

ça s'est de la narration !!!! Quelle écriture, ça rappelle un peu les témoignages d'aventuriers du 19ème siècle .
On sent l'aventurier et le barroudeur qui si il n'oublie pas ses sandwichs peut oublier autre chose. :mrgreen:
Bon sinon, la rencontre avec Luc Plateaux a dû être intéressante, lui, le spécialiste des Temnothorax.
Quel âge a t il ? Que devient il ? Continue t il à barrouder à la Cagniant ? :)
Merci pour la pub auprès du journaliste. ;)
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Christian Dégache
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niger = noire ? : non
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Re: Sortie dans les Vosges mai 2008

Message par Christian Dégache »

Oui merci Philippe ! ;)
Les rapaces sont des oiseaux magnifiques, j'aimerai pouvoir vivre une petite expérience comme la votre !
Très intéressant ces comptes rendu ! J'espère que cette section aura beaucoup de succès !
J'attend avec impatience les nouvelles aventures de Christophe aussi !
D'ailleurs il faudra qu'il posts ses anciennes rando. ;)
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